La connaissance de la douleur
Carlo Emilio GADDA
Le livre
Je le lis en poche. Je trouve bien une autre édition, chez Seuil en grand format. Vous voyez peut-être couvertures blanches avec liserai extérieur vert... Bref, Seuil j'y reviendrai (en dehors du groupe) comme Maison d'édition parce qu'on ne peut en ce moment échapper au défenseur, à la caution intellectuelle de François-Marie Banier, Monsieur Roberts, éditeur et ami dudit (dont on pouvait lire le portrait dans la souvent délicieuse dernière page de Libération et qu'on a pu entendre sur France inter et qui est notamment bien servi par Christophe Donner). Bref, la version que je pioche en fait dans une poche de sac à dos qui n'est pas la mienne, est affublée d'une illustration de couverture qui à la fois illustre bien et à la fois me semble desservir le livres, l'oeuvre, l'aplatissant, la rendant ennuyeuse avant l'ouverture.
Le pitch
Une veuve, et son fils colérique et sédentaire, le médecin... non vraiment il n'y a pas d'histoire linéaire dicible, ou ce n'est pas l'intérêt.
L auteur
Gadda, auteur italien né en 1893 - mort en 1973. Peut-être que vous avez croisé son oeuvre plus connue L’Affreux Pastis de la rue des Merles, trad. de Louis Bonalumi, Préface Franaçois Wahl
Très connu et très cité. Que je relirai cet été, dans le cadre de mon désormais décennal plan "lisons joyeusement les classiques l'été". Peut-être au même titre que d'autres oeuvres du même auteur. Moi, d'après mes fiches de lecture j'ai déjà lu LA mécanique, Les Colères du capitaine en congé libérable.
Mes modestes remarques
Un style fait pour votre serviteur, donc si vous partagez quelques uns de ses enthousiasmes, fait pour vous !
Des phrases descriptives (parfois trop) mais toujours haletantes. J'ai envie pour évoquer basiquement les thématiques d'évoquer L'arrache-coeur de Vian ou Sender Le roi et la reine (disponible chez Attila), un milieu rural comme décor avec quleques éléments de ....
Mais derrière ça : le lieu comme la langue sont un mix, mettons une invention pour être plus clair et plus lapidaire. Le Madragal et le Paragal mélangent l'Amérique du Sud (pas besoin de décodeur) et l'Italie qui transpire tellement dans ce récit.
Le plus notable, pour votre serviteur évidemment, dans le style de Gadda c'est son utilisation des deux points et de l'énumération. Si j'ai pas trop mal compris, il se sert des deux points de façon efficiente mais aussi comme élément rythmique. Les phrases (surtout en fin de paragraphe ou d'unité de sens) sont diviésées en deux ou trois par ces fameux deux points inférant une relation de cause à effet souvent, introduisants une énumération le plus souvent en fin de phrase. Mais en gros hiérarchisant toujours le propos, de façon à nous tenir en éveil.
Une ironie incourtournable, bien souvent je lis des "critiques littéraires qui parlent d'une écriture ironique, ou avec une dose d'ironie, je n'avais pas trop compris avant. Ca y est j'ai compris ! (cf. les extraits ci-après).
Mais surtout, avant tout, une magnifique langue, variée, pas compassée mais juste exigente et exacte. Merci au traducteur !!!
Les extraits
P.55 "Sur l'ormeau sans ombre, une cigale craquetait à perdre haleine, à la rencontre de midi, dilatant l'interminable clarté estivale."
p. 56 ""Faut s'accrocher" lui disaient-ils et d'ajouter : " défendre son biftek !" Lui n'avait nul génie pour s'accrocher ou pour défendre son biftek, exercices dans lesquels il se révélait aussi adroit q'un phoque à faire frire des tortellini."
"Le bavardage n'avait pas l"heur de coaguler"
etc...
donc si vous avez bien lu, voir aussi
Vian L'arrache coeur Sender Le roi et la reine Salinger